Forum Plus d’ici dans Antoine-Labelle : une journée pour nourrir les réflexions et mettre la table à une stratégie porteuse

13 novembre 2025
Présentation du contexte local et national, qui met la table au projet.
Présentation de l’origine du projet par Véronique Allard, chercheuse au CISA. Photo : Kateline Grondin, CISA

Organisé par l’équipe de la MRC d’Antoine-Labelle et orchestrée en collaboration avec le CISA en s’appuyant sur les caractéristiques distinctives du territoire, le Forum Plus d’ici dans Antoine-Labelle s’est tenu le 5 novembre dernier avec pour principal objectif de faire le « pas de plus » pour accélérer l’intégration des aliments locaux dans les hôtels, les restaurants et les institutions (HRI) de la région. Il s’inscrit également dans un mouvement plus large visant à renforcer l’autonomie alimentaire locale.

Près d’une centaine de participants et participantes, issus du milieu agroalimentaire local ou étroitement concernés par le sujet, se sont rassemblés à l’Espace Théâtre de Mont-Laurier à cette occasion. C’est dire comme le besoin de se concerter, et de mieux connaître les acteurs et actrices du territoire, était bien présent et attendu de tous et toutes!

Mieux se connaître, pour mieux agir

Pour savoir jusqu’où on peut aller, il faut savoir où l’on en est, actuellement. C’est pourquoi la journée s’est ouverte sur la présentation du contexte local et national en matière d’approvisionnement local, durant laquelle on a pu en apprendre plus sur l’initiative Plus d’ici dans nos cafétérias à l’origine du projet, sur les leviers que proposent également la Stratégie nationale d’approvisionnement en aliments locaux, avant de partager un portrait régional, élaboré à partir de plusieurs sondages et entretiens menés au cours des derniers mois.

Présentation du portrait régional par Aude Fournier, enseignante-chercheuse au CISA. Photo : Kateline Grondin, CISA

Son diagnostic a révélé un potentiel important pour l’augmentation des achats locaux : non seulement 77 % des établissements HRI affirment déjà intégrer des aliments issus du territoire à leur menu (principalement du lait, des légumes et du fromage), mais plus de 56 % des répondants se disent ouverts à leur faire plus de place. Le secteur des services de garde éducatifs à l’enfance et celui de la restauration représentent à eux seuls plus de 70 % des établissements recensés, illustrant leur rôle stratégique pour favoriser l’accès aux aliments locaux. Du côté de l’offre, 72 entreprises agroalimentaires ont été recensées, dont plusieurs démontrent un intérêt marqué pour le marché institutionnel, malgré les obstacles logistiques et économiques.

La présentation a également mis en lumière quatre grands enjeux structurants à travailler collectivement : (1) l’interconnaissance et le maillage entre les acteurs de l’offre et de la demande, freinée par une méconnaissance mutuelle des réalités de chacun ; (2) le transport et l’accessibilité aux aliments locaux, affectés par les distances, le faible maillage logistique et la densité démographique ; (3) l’adéquation de l’offre aux besoins spécifiques du secteur HRI, notamment en termes de formats, volumes et prix ; et (4) l’engagement des établissements et de leurs usagers envers l’achat local, qui reste souvent limité par un manque de ressources, de temps ou d’accompagnement.

Ce portrait a donc permis de poser un cadre commun et de nourrir les réflexions à venir, en illustrant clairement où se situent les leviers de transformation et les freins à lever pour renforcer les circuits courts sur le territoire. Suite à sa présentation, quatre actrices locales sont venues témoigner de leur propre expérience et aspirations quant à la démarche, dont Mireille Paradis, propriétaire du Kaffé Krème, Valérie Guénette, coordonnatrice des services éducatifs au Centre de services scolaires des Hautes-Laurentides, Nancy Lebrun, directrice des ventes à la Laiterie des 3 Vallées, et Joelle Lafrenière, copropriétaire des Enfants de la terre.

Vous souhaitez voir ou revoir les informations transmises par cette présentation? Téléchargez la présentation complète ici.

L’activité de réseautage Cherche et Trouve a ensuite permis de connecter rapidement producteurs, transformateurs, distributeurs et acheteurs institutionnels. Une véritable synergie s’est dessinée à travers les échanges; nous espérons que les discussions se poursuivront hors les murs de cet événement!

Activité de réseautage « Cherche et trouve ». Photo : Kateline Grondin, CISA

Deux panels pour faire un pas de PLUS vers le local

L’un des temps forts de la journée fut sans contredit la tenue de deux panels en parallèle, qui ont permis d’explorer les défis et les leviers du virage local, tant du point de vue des acheteurs (HRI) que des producteurs et transformateurs locaux. Ces discussions, riches en exemples concrets et en apprentissages terrain, ont mis en lumière le rôle central de la collaboration, de la créativité et du soutien régional dans la transformation des systèmes alimentaires.

Du côté de la demande…

Panel « Un pas de PLUS du côté de l’offre ». Photo : Lucie Goupil

Du côté de la demande, les intervenantes ont abordé avec franchise les défis auxquels font face les hôtels, restaurants, institutions et pourvoiries lorsqu’il est question d’approvisionner leurs cuisines avec des aliments de chez nous.

Ariane Charron-Bigras, du CISSS des Laurentides, a levé le voile sur la complexité de l’approvisionnement dans le réseau de la santé, où les contraintes budgétaires, les appels d’offres publics et la standardisation des menus laissent peu de place à la flexibilité. Pourtant, elle a montré qu’il est possible de faire une place aux produits d’ici, notamment en remplaçant certains aliments importés par des équivalents régionaux, sans alourdir les coûts.

Édith Ouellet, de l’ITHQ, a apporté un regard structurant sur les leviers existants à l’échelle provinciale, en mettant de l’avant des outils concrets comme les gabarits d’appel d’offres adaptés à l’achat local ou les stratégies de gradualité dans l’intégration de produits régionaux. Elle a insisté sur la valeur du réseautage entre établissements et sur la montée en compétence des équipes d’approvisionnement.

Dans un tout autre contexte, celui de la restauration privée en région, Noémie Dagenais, propriétaire de L’Échoppe 5 à Chute-Saint-Philippe, a partagé son parcours entrepreneurial ancré dans la valorisation des produits d’ici. Pour elle, cuisiner local, c’est une façon de créer du sens, de fidéliser sa clientèle et de bâtir une identité culinaire forte, même si cela demande une bonne dose de créativité logistique au quotidien.

Enfin, Lyne Royer, d’Équiterre, a rappelé l’importance des projets collectifs et des outils d’accompagnement pour soutenir les établissements dans leur transition vers l’achat local. Elle a souligné que des initiatives structurantes, comme les communautés de pratique ou les guides de planification de menus durables, peuvent considérablement alléger le travail des équipes et accélérer le virage vers une alimentation locale, saine et résiliente.

… et du côté de l’offre

Panel « Un pas de PLUS du côté l’offre ». Photo : Lucie Goupil

Pendant ce temps, le second panel réunissait quatre femmes engagées dans le développement de l’offre agroalimentaire locale. Elles ont partagé avec réalisme les embûches rencontrées par les entreprises bioalimentaires qui souhaitent intégrer le marché HRI — mais aussi les solutions novatrices qu’elles mettent en place pour y parvenir.

Céline Bélec, présidente de la Boucherie Nordest, a livré un témoignage sans filtre sur la difficulté pour les petites entreprises d’accéder au système d’appels d’offres publics. Elle a souligné la rigidité administrative du SEAO, qui nuit à la participation des PME malgré la qualité et la proximité de leurs produits. Elle a toutefois insisté sur l’importance de bâtir des relations de confiance avec les institutions locales, qui peuvent parfois contourner les contraintes formelles pour privilégier une approche humaine et durable.

Nicole Lavoie, directrice générale des Saveurs du Bas-Saint-Laurent, a présenté une série d’initiatives de mutualisation logistique, dont la plateforme La Charrette, qui permet à plusieurs producteurs de regrouper leurs livraisons vers les institutions. Cette approche, ancrée dans la réalité régionale, facilite non seulement le transport et l’entreposage, mais aussi la gestion des commandes, tout en réduisant les coûts.

Marie-Lyne Bélair, coordonnatrice bioalimentaire au Conseil des préfets et des élus des Laurentides, a insisté sur l’importance du maillage territorial. Elle a partagé l’exemple de rencontres organisées entre producteurs et gestionnaires d’établissements publics, qui ont permis de créer des ponts concrets, de faire émerger des ententes d’approvisionnement et de mieux faire connaître l’offre locale aux institutions.

Enfin, Josée Mercier, conseillère au MAPAQ, a parlé du rôle crucial de l’accompagnement. Elle a rappelé que plusieurs entreprises agricoles n’ont pas les ressources ni les connaissances pour naviguer dans les rouages du marché institutionnel, et que les agents de développement, les organismes et les MRC ont un rôle à jouer pour traduire les exigences et faciliter la mise en marché.

Ces deux panels ont permis de faire émerger une vision partagée : le virage local dans le secteur HRI est non seulement souhaitable, mais possible. Encore faut-il soutenir les acteurs de part et d’autre, documenter les bons coups, et miser sur les forces vives du territoire pour faire tomber les barrières qui freinent l’approvisionnement local.

Assemblées de cuisine : six projets concrets au menu

L’après-midi a été marqué par la tenue de six ateliers de cocréation autour de projets concrets visant à renforcer l’approvisionnement local. Parmi les idées discutées : la création d’un poste pour du maillage régional, le soutien logistique à une école primaire pour intégrer plus de produits d’ici, le regroupement de fermes maraîchères pour mutualiser leurs efforts, et le développement d’une offre locale adaptée au tourisme. D’autres propositions ont exploré l’implication des organismes communautaires dans la transformation alimentaire et la mutualisation des routes de livraison, à l’image d’initiatives existantes ailleurs au Québec. Ces discussions ont généré des collaborations naissantes et une belle énergie collective pour faire avancer ces projets sur le territoire.


Une impulsion collective bien lancée

Le Forum a permis de faire émerger des projets porteurs, de tisser de nouvelles collaborations et de faire rayonner les forces du territoire en matière d’alimentation locale. Portée par des idées concrètes et une volonté commune d’agir, la journée s’est conclue sur un appel à poursuivre l’élan, ensemble. Les prochaines étapes, dès l’hiver, permettront de transformer les pistes explorées en actions durables qui seront intégrées à l’intérieur d’une stratégie concertée d’approvisionnement en aliments locaux.

Pour ne rien manquer des prochains ateliers à venir et du contenu de cette future stratégie à mettre en place sur le territoire, abonnez-vous à l’infolettre du projet.

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